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En reprenant le même terrain de jeu, les fourmis et l'acacia, si l'on ôte les grands herbivores et si l'on rajoute un singe, on obtient une nouvelle histoire !
Ici le singe patas (cf. photo supra) est le principal prédateur des fourmis vivant dans l'arbre (Acacia drepanolobium).
Ce rôle est plus classique, illustrant une chaîne alimentaire simple, occupée en son sommet par le primate ; mais cette histoire est néanmoins étonnante car environ 1/3 de l'alimentation quotidienne du patas est constituée de ... fourmis, et ce, tout au long de l'année ! Il est précisé que cette région de l'est africain est marquée par un climat semi aride et deux saisons très tranchées : saison pluvieuse et saison sèche.
Ce comportement myrmécophage se retrouve également chez d'autres grands primates tels que chimpanzés, mangabey à joues blanches qui passent un temps considérable à manger des fourmis. Or le comportement insectivore des mammifères est plutôt habituellement lié à des prédateurs de petits gabarits ; en effet, les insectes représentent habituellement des ressources alimentaires petites en taille et dispersées.
Ce qui est également étonnant, c'est que la reproduction du patas est caractérisée par une courte période inter naissances ; de plus, la reproduction se déroule chaque année pour les individus fertiles ce qui est un comportement semblable à la reproduction de petits mammifères insectivores et ce qui signifie qu'une source de nourriture est certainement disponible tout au long de l'année : les fourmis fréquentant l'acacia ; mais pas n'importe lesquelles : celles utilisant les domaties pour y loger les ouvrières et les œufs, c'est-à-dire Crematogaster mimosas, Crematogaster nigriceps et Tetraponera penzigi.
Un auteur estime que les fourmis à acacia représentent 4000 kg de biomasse par km² dans la savane arborée à Acacia drepanolobium. Ceci place ces fourmis comme le principal animal dominant de cet écosystème. C'est la progéniture de ces fourmis qui est recherchée (oeufs, larves, pupes et les reproducteurs ailés) plutôt que les adultes (très chitinisés). En effet, cette progéniture est moins protégée et potentiellement plus riche en graisses, protéines et sucres.
L'étude citée montre que la présence continue de fourmis, peu sensibles aux variations saisonnières compense la variation des plantes disponibles sensibles à la saison sèche et de leur production : fleurs, fruits, champignons.
Autre information montrant l'importance des fourmis dans le régime alimentaire des patas : ils ne montrent aucun signe de faiblesse physique liée à la sécheresse et leur taux de reproduction n'est pas affaibli durant cette période.
Enfin, il faut signaler que les domaties occupées par Crematogaster mimosae contiennent également des larves d'insectes autres que de fourmis, ainsi que des Coccoidea (cochenilles) élevées par les fourmis ; cette source de nourriture complémentaire explique certainement pourquoi les patas consomment abondamment le contenu des domaties occupées par Crematogaster mimosae, l'espèce de fourmi pourtant la plus agressive parmi celles fréquentant cet acacia.